dimanche 17 février 2013

Interdiction du financement des ostensions


Financement public des ostensions limousines :
le Conseil d’Etat rejette les pourvois
des confréries et associations catholiques
 La loi de 1905 interdit tout financement public des cultes !
Une victoire des laïques et de la Libre Pensée
  
Rappel des faits 
Les ostensions limousines sont des processions qui ont lieu tous les 7 ans dans une vingtaine de communes du Limousin, principalement de Haute-Vienne. Elles ont pour origine la croyance survenue après une procession en l’an 994 en la guérison miraculeuse à Limoges de milliers de personnes atteintes d’ergotisme, une maladie due à un champignon, l’ergot de seigle. Ce sont des manifestations religieuses du culte catholique comme le revendique lui-même le diocèse de Limoges : « Les ostensions limousines sont des manifestations religieuses […] C’est une sortie des reliques des saints et de leurs reliquaires et de leurs châsses au cours d’une célébration chrétienne ou de plusieurs (reconnaissance, eucharistie, procession) pour les montrer, les lever, et les donner à la vénération du peuple rassemblé. »
En mai 2009, 21 Laïques et Libres penseurs de Haute-Vienne et de Creuse ont demandé au Tribunal Administratif de Limoges de juger l’illégalité de subventions publiques aux ostensions et ainsi de faire respecter la loi de 1905, particulièrement son article 2 qui dit: « la République ne reconnaît, ne salarie, ni ne subventionne aucun culte.(…). Le Conseil général avait versé 26 360€, le Conseil régional 41 497€ et toutes communes concernées sauf une avaient octroyé aux comités ostensionnaires des subventions d’un moment variable de 2 000 à 20 000€.


Le Tribunal administratif de Limoges a donné raison aux laïques et libres penseurs par un jugement en date du 24/12/2009


Suite à ce jugement, les sommes versées aux confréries et comités coorganisateurs des ostensions ont été restituées aux collectivités publiques. Cette décision du Tribunal a été contestée en appel devant la Cour Administrative d’Appel de Bordeaux en 2010 par 6 confréries et comités, par une commune et par le Conseil Régional du Limousin (à l’unanimité de la commission permanente, droite et gauche moins une voix).
  
La Cour Administrative d’Appel de Bordeaux
par des arrêts rendus
le 21/12/2010
a confirmé le jugement du Tribunal administratif de Limoges
 
Deux confréries et un comité ostensionnaire se sont obstinés en portant l’affaire devant le Conseil d’Etat en introduisant deux pourvois en cassation en avril 2011 demandant l’annulation des arrêts de la Cour d’Appel. Ces associations catholiques apparemment fortunées, ont obligé les 21 laïques et libres penseurs à continuer ce combat en justice et à leur frais devant le Conseil d’Etat pour demander que soient rejetés ces pourvois et à nouveau jugé illégitime la prétention de financer les ostensions par l’argent public.

Le Conseil d’Etat  a rendu ses conclusions le 15/01/2013, il a
rejeté les pourvois des confréries et associations catholiques.

Le Conseil d’Etat a jugé que la Cour administrative d’appel de Bordeaux n’avait fait aucune erreur de droit, que les ostensions sont bien en premier lieu des manifestations religieuses du culte catholique et qu’à ce titre elles ne peuvent donc bénéficier de subventions publiques. Le Conseil d’Etat a jugé que l’article 2 de la loi de 1905 n’est nullement incompatible avec les articles 9 et 14  de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, articles qui se rapportent au droit de toute personne à la liberté de pensée , de conscience et de religion. Le Conseil d’Etat a donc rejeté l’argument mis en avant par les confréries voulant faire reconnaître une discrimination à l’encontre des catholiques dont les ostensions ne seraient plus subventionnées. Le Conseil d’Etat a condamné aux dépens les 3 associations.

Quelques rappels sur 4 années de combats et procédures


Pour ce qui concerne le Conseil général de Haute-Vienne et le Conseil régional du Limousin, ce sont les commissions permanentes de ces collectivités publiques qui ont pris en 2009 les décisions de subventionnement et cela à l’unanimité de leurs membres, toutes sensibilités politiques confondues (PS, PCF, Verts, UMP).

Si le Conseil général décida de ne pas faire appel de la décision du Tribunal administratif de Limoges de décembre 2009 jugeant illégal les subventions publiques aux ostensions, rappelons que le Conseil Régional quant à lui fit appel, cette décision fut prise à l’unanimité moins une abstention.

Dans le cadre de cette procédure Monsieur Denanot Président du Conseil Régional (socialiste) fit introduire en août 2010 par ses avocats le dépôt d’une QPC (question prioritaire de constitutionnalité) pour faire juger l’inconstitutionnalité de l’article 2 de la loi de 1905. Rien que ça de la part d’un élu de la République, membre du parti constitué par Jean Jaurès, celui qui fut un des artisans de la loi de 1905, cette œuvre incomparable des socialistes, des républicains, des francs maçons et des libres penseurs de l’époque, cette loi qu’ils firent graver dans le marbre, admirée et enviée depuis par les démocrates et les peuples du monde entier !

Là encore, il fallut toute la vigilance et l’intervention rapide et énergique des laïques de Haute-Vienne, des instances de la Libre Pensée jusqu’à l’intervention de son Président Marc Blondel pour que le Président de la Région Limousin abandonne cette prétention anti laïque et réactionnaire de faire juger anti constitutionnelle la loi de 1905.

Et que n’a-t-on lu et entendu durant ces 4 ans  comme arguments éculés et renoncements laïques mais aussi comme mensonges et attaques à l’égard des libres penseurs ! Reconnaissons que dans ce domaine les organisations catholiques ne furent pas les plus virulentes au regard de l’attitude de certains élus de la République et de responsables politiques (droite et gauche) qui au nom du développement du tourisme, du commerce local, de l’artisanat, de l’électorat, du patrimonial, de la tradition limousine, etc…défendirent avec acharnement le subventionnement public des ostensions catholiques.

Les conclusions du Conseil d’Etat confirmant l’illégalité de subventions publiques aux ostensions remettent les pendules à l’heure. La loi de 1905 et la laïcité sont vivantes dans la conscience de l’écrasante majorité des citoyens de ce pays.

La Séparation des Eglises et l’Etat est un principe intangible de la République.

Il n’appartient à personne de faire tourner la roue de l’Histoire à l’envers. Cela ne renforce que plus la détermination de la Libre Pensée d’œuvrer, sans relâche, pour l’abrogation de loi Debré, mère de toutes les lois anti laïques.